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lundi 4 mai 2015

Remplacement.

- Dis-moi si ça fait mal quand je tire.

J’ai senti la tension augmenter rapidement sur mon cathéter au moment où le médecin s’est mis à tirer sans retenue jusqu’à ce qu’un vif pincement se fasse sentir.

- Ça fait mal ! 

Il relâcha tout avant de m’indiquer qu’il allait me geler. Un signal d’alarme venait toutefois d’être lancé au travers de mon système nerveux jusqu’au cœur qui s’était mis à battre à un rythme infernal. Ce réflexe ancestral encodé en chacun de nous prodiguant au corps l’énergie nécessaire pour fuir le danger n’avait pas été sollicité depuis des années et voilà que ma cage thoracique se faisait marteler par un cœur emballé. Couché sur le dos dans cette pièce climatisée, la tête immobilisée par de multiples champs stériles, le bras gauche ligoté en intraveineuse au soluté et le bras droit lié par le tensiomètre, je n’avais nul par où aller. Ni loup, ni ours ni autre créature voulant se servir de ma chair comme festin n’étaient présents dans la salle, mais seules quelques infirmières attentionnées qui avaient pris soin de m’installer confortablement, d’enlever délicatement le pansement qui couvrait le cathéter veineux central qui devait être remplacé aujourd’hui, avant de me désinfecter de multiples solutions à base d’alcool, me prévenant avant chaque application que cela allait être froid. Puis ce médecin qui allait procéder au remplacement qui venait de tirer sur ce tube causant tout cet affolement corporel.

- J’ai le cœur qui palpite! 

- Prend de lentes et profondes respirations, ça va passer.

Depuis la salle d’attente que je m’efforçais à rester calme, à contrôler ma respiration, à bloquer le tapotement nerveux de mon pied et voilà que la première intervention du médecin me renvoyait à un danger de mort. Au tout début, lorsque j’ai commencé l’hémodialyse et que cela était complètement nouveau pour moi, la peur associée au cathéter arraché me poursuivait jusque dans mes rêves. Je ne peux compter le nombre de fois où je me retrouvais à devoir me rendre à l’urgence avec ce tube entre les mains, délogé de sa tanière chaude de ma jugulaire pour finalement me réveiller dans le plus grand malaise. Une fois, il m’était même arrivé de me réveiller alors que je tentais inconsciemment de me l’arracher, tirant à petits coups sur le pansement qui démangeait continuellement. 

- Ça va piquer un peu. Ok, attention un, deux, trois, ouch! 

La formule surprenante qu’avait utilisée le médecin avant d’injecter la formule anesthésiante m’a fait sourire et l’habituelle douleur que provoque l’aiguille qui s’enfonce dans le pectoral s’en est trouvée moins importante que dans mon souvenir. Même à la deuxième injection, l’effet de surprise dissipé, la piqûre fut bénigne. Aussitôt l’anesthésie faite, le médecin s’est remis au travail. Je craignais qu’il n’ait pas suffisamment attendu que les injections aient fait effet, mais il se trouve que le résultat était instantané, car déjà je n’ai ressenti aucune douleur. 

Le plus étrange lors d’une anesthésie locale c’est qu’on ne ressent pas la douleur, mais on perçoit les tensions, les mouvements, les frictions. Le médecin tire avec force, je ne sais pas exactement comment il s’y prend, car depuis le début de l’opération j’ai la tête posée en sens inverse de l’action et les champs stériles cachent une partie de ma vue. Tout ce que je sais, c’est que le cathéter se déplace sous ma peau, que le tout ne se fait pas dans une grande délicatesse et que cette agression corporelle va certainement laisser son lot de souffrance lorsque l’effet anesthétique va se dissiper. 

Le médecin donne ses indications à une étudiante afin qu’elle insère le nouveau cathéter. Contrairement à la première fois, il n’y a pas de tunnel à creuser pour se rendre à ma jugulaire : l’étudiante n’a qu’à suivre le même chemin qu’empruntait l’ancien tube. À l’aide d’un appareil d’imagerie, le médecin et son étudiante peuvent voir exactement l’endroit où doit se rendre l’embouchure du cathéter, quelque part dans mon cœur. Une fois les derniers ajustements complétés, l’opération se termine par une nouvelle séquence d’anesthésie avant de faire quelques points de suture pour maintenir le cathéter en place le temps que le corps cicatrise et s’agrippe au coffre en tissu, permettant son l’immobilisation. L’aiguille me pique, mais la douleur n’est pas assez vive pour que je le mentionne. Ce sont d’ailleurs ces points de suture qui sont les plus déplaisants lorsque la sensation revient à la normale; cela donne l’impression de plusieurs piqûres sur la peau sous le pansement. Le site va rester sensible plusieurs jours. Il faudra éventuellement le nettoyer à l’alcool pour déloger les croûtes de sang séché qui se seront formées; c’est ce qui est le plus douloureux dans toute cette opération tant cela est vif et que l’alcool semble transpercer la chair comme un poignard. Ça, je m’en souviens très bien. 

Un autre moment où ma patience est mise à l’épreuve, une autre pause le temps que le corps guérisse. Je reviens momentanément à la case départ. Et la greffe qui se fait attendre. Un autre été en dialyse? Un autre été loin des piscines, loin des terrasses et de la bouffe de rue. Une simple épreuve de plus, un événement pratiquement routinier, une mutilation de plus; rien de très sauvage. Ces choses ne me font plus mal, mais je deviens impatient.

samedi 30 novembre 2013

Dallas Buyers Club et moi (première partie)

Je suis allé voir Dallas Buyers Club, le dernier film de Jean-Marc Vallé (C.R.A.Z.Y., Café de Flore) mettant en vedette un Matthew McConaughey méconnaissable et sublime. J’ai été frappé par les nombreux parallèles que j’ai pu établir entre la vie de Ron Woodroof qui est dépeinte dans le film et la mienne. Woodroof était atteint du VIH/SIDA et il a combattu la maladie avec acharnement afin de ralentir la mort ou prolonger sa vie, selon le point de vue que vous préférez adopter. Pour ma part, je ne combats rien; j’ai été frappé et tel un délit de fuite ne laissant pour témoins que deux corps aux chairs nécrosées, deux reins aux fonctions anéanties, la maladie est passée et j’en subis aujourd’hui les conséquences. Je n’ai rien d’un cowboy texan macho et homophobe pourtant, l’expérience de vie imposée par la maladie me rapproche de ce Woodroof de manière improbable. 

Première partie: La Haine.


Je savais bien que quelque chose clochait avec moi et j’aurais sans doute misé sur une mononucléose ou une dépression ou quelque chose dans le genre et après avoir passé quelque tests au CLSC, j’allais enfin connaître le verdict. J’entrais dans la clinique où s’entassait une foule grippée, aux symptômes tout aussi inconfortables que bénins. Je les regardais morver et tousser en chœur, retenant mon souffle pour éviter d’inhaler un virus contagieux. J’imaginais déjà le docteur regarder mes résultats et me dire que rien ne semblait anormal, que j’avais simplement besoin de sommeil. On appela enfin mon nom ou enfin, quelque chose qui ressemblait à mon nom.

Je m’assis en face d’un petit asiatique grisonnant, au visage tapissé de rides et au regard endormis par une routine médicale composée de gorges irritées et d’oreilles bouchées et attendis qu’il mette enfin un terme à ce suspense inutile. Je voyais mal ce qu’il pouvait trouver à me dire mis à part les quelques conseils d’usage: bien manger, faire du sport, arrêter de fumer, dormir, surtout dormir. Il parcourut du regard les colonnes de chiffres qui interprétaient mathématiquement les divers composants de mon sang, soulignant à l’occasion de son doigt quelques données qui lui semblaient particulièrement intéressantes. Il analysa en silence, sans même émettre un soupir ou un quelconque signe que j’aurais pu capter, son visage marqué au fer d’un point d'interrogation, sinon inexpressif. Il restait dans sa bulle et je pouvais sentir le doute s’installer en moi tel un parasite s’enroulant autour de mon estomac et le serrant de plus en plus fort. Soudainement, c’était moi qui affichais l'expression la plus inquiétante. Il baragouina finalement quelques mots, brisant l’inconfort avant qu’il ne meuble complètement la pièce. Son français aussi médiocre que ses qualités de communicateur me permit tout de même de comprendre qu’une donnée indiquait un problème au niveau des reins. Il me présenta certaines données dépassant outrageusement les limites retrouvées dans le sang d’un humain normalement constitué et se tourna vers sa bibliothèque afin de consulter un ouvrage médical. Je sentais son inquiétude grandissante, bien qu’il sembla dépourvu de mots pour l’exprimer, et cela, de manière proportionnelle à l’impatience qui m’habitait dorénavant. J'observais le petit médecin, le nez penché au-dessus de son livre, et restai silencieux face à ce spectacle, secouant lentement la tête d’incrédulité, me questionnant sérieusement quant aux compétences de cet être qui m'apparaissait déjà dépassé par la situation. Bouillant intérieurement devant autant de maladresse communicationnelle, je sentis la haine m’envahir; une haine aussi forte qu’un tsunami, aussi brûlante qu’une coulée de lave, immergeant chacun de mes organes d’un poison sulfureux, embrasant mon cœur qui accéléra immédiatement, enflammant mon visage qui relâchât quelque goûtes de sueurs, tentant ainsi en vain de contrecarrer le flot émotionnel. Je ne savais toujours pas ce qui n’allait pas avec moi, mais le messager apportait une nouvelle suffisamment mauvaise pour vouloir lui en faire payer le prix. 

Je sentais le médecin agité de l’intérieur et pourtant, il semblait calme, compétent même. Il m’adressa finalement la parole et débuta un discours absolument confus, m’urgeant de consulter un néphrologue, répétant que mes tests n’étaient “pas bons” et que mes reins avaient un problème. Je me demandais s’il pouvait trouver une formule encore plus affolante ou si la qualité de son français n’aggravait pas simplement des propos qui originalement devaient être des recommandations. Je tenta en vain de lui extirper quelque conseils sur la démarche à suivre, mais il se contenta de répéter les mêmes mots, tout en me dirigeant vers la sortie, me pressant de prendre rendez-vous avec un spécialiste. 

Je suis sorti de la clinique, la rage au ventre, les larmes aux yeux, sacrant et méprisant sans personne pour m'entendre. Je détestais ce petit homme pour m’avoir annoncé que mes organes vitaux souffrait. Je pestais contre lui de ne pas avoir su me rassurer, ni même m'informer et de m’avoir abandonné sur le trottoir après avoir sublimé le scénario du lendemain heureux que je m'étais préalablement créé. Tout ça ne pouvait être vrai; j’étais trop jeune et trop en santé pour qu’une pareille chose m’arrive. Il devait se tromper. C’est ça! Il a dû se tromper ce sale petit incompétent! Les reins: ce sont les vieux qui ont des problèmes de reins, pas moi. Idiot.

En 1985 lorsque Ron Woodroof apprend qu’il est atteint du VIH, dans son esprit seuls les homosexuels pouvaient contracter la maladie. Que cela arrive à un hétérosexuel, un homme, un vrai, un mâle viril comme lui, ne faisait que trahir une erreur médicale. Qu’un médecin ose même présumer qu’il aurait peut-être eu des relations sexuelles avec un autre homme était la preuve même de son incompétence. Le réflexe de haine en est un de protection; on se protège comme on peut d’une attaque aussi grave à notre intégrité et je te comprends d’en vouloir à celui qui t'a livré le message. Je n’en ai jamais voulu contre la vie, ou enfin j’ai peut-être maudit le ciel quelques instants avant de me trouver une cible plus concrète. Tout comme toi Ron, j’ai immédiatement remis en question les capacités du médecin. J’ai même demandé un deuxième avis, mais il a fallu se rendre tous les deux à l’évidence: on ne pouvait plus continuer comme avant. Quelque chose était maintenant brisé en nous pour toujours.

jeudi 25 octobre 2012

De corps et d'esprit.

À l'hôpital, c'est le corps qu'on soigne. Le corps et rien d'autre. Cette semaine, on s'est relayé tour à tour, infirmières, docteurs pour me parler de la fistule, pour m'intimer de choisir cette alternative illico. On m'en parle comme s'il s'agissait du renouvellement d'une médication, un verre d'eau, une pilule, une gorgée et le tour est joué. Il existe certainement des patients, des individus, pour qui ce n'est pas plus compliqué que ça. Malheureusement, ce n'est pas mon cas et cela n'est simplement pas pris en considération dans l'approche du personnel hospitalier. Je suis une donnée dans une équation mathématique. On n’est pas loin des soins/garage. Je m'en fais sans doute beaucoup trop avec cette intervention de routine... Sans doute. Pourtant, j'aimerais simplement qu'on s'occupe de moi, l'espace d'une conversation qui ne tourne pas autour des risques impliqués avec le choix de garder le cathéter. L'approche semble toujours la même, si je refuse une intervention, on n'essaie pas de me rassurer, on tente plutôt de me faire peur. Les risques, toujours plus de risques. À défaut de pouvoir pratiquer des sports extrêmes, je vais faire de la médecine à haut risque. Faire capoter le staff est mon passe-temps favori. 

Tu es malade, on te répare et tu retournes chez toi. Jamais je n'ai eu d'aide psychologique, on ne m'en a jamais proposé, jamais on s'est intéressé à l'impact de la maladie sur mon intégrité psychique. J'ai droit aux conseils d'une nutritionniste, le docteur passe à tous les jours pour me demander si je n'ai pas de nouveaux symptômes, des bénévoles nous font jouer au bingo pour passer le temps, j'ai une télévision à moi tout seul, les infirmières s'intéressent à la possibilité de nouvelles hémorragies avant de me brancher et j'ai même eu droit à un examen et des conseils pour les soins des pieds. Comment puis-je me plaindre? Je suis traité aux petits oignons. Je suis censé vivre avec la maladie et avec tout ce qu'elle m'impose avec la même facilité d'un nouvel emploi. Je punch à l'entrée, on me donne une promotion, un nouvel habit de travail, aujourd'hui quelque heures supplémentaire, punch out. 

Pour me faire entendre, je vais devoir me fâcher. Et cela me fâche encore plus. Je les déteste de m'obliger à me fâcher. C'est quand même incompréhensible tout ça, que la médecine moderne n'attache aucune importance à l'esprit, à la condition psychologique à moins de pouvoir prescrire des pilules, panser le cerveau et devenir heureux, abracadabra! C'est comme les annonces du gros porc qui mange de l'esti de junk à la télé, mais que c'est pas grave parce qu'il prend des pilules pour empêcher les brûlements d'estomac. Ça camoufle bien le mal le temps d'un repas dégueulasse, mais tu es toujours un gros porc qui fait des brûlements d'estomac. Fuck you gros porc.

samedi 12 novembre 2011

Fistule, hémorragie et dodo

Je suis allé passer un premier examen afin de savoir si je suis un bon candidat pour la fistule. J'ai en effet de très belles veines selon le médecin ce qui me permet de poursuivre les examens mardi prochain. Malgré tout, je voudrais bien éviter cette opération. Même si la fistule représente beaucoup moins de risques d'infection que le présent cathéter, même si cela évite un risque que mes veines se contractent, la fistule me hante et me dégoute. Mais tout n'est pas qu'apparence.

Quand je me regarde dans le miroir avec mes tubes et mes cicatrices, ce que je vois ne me dégoute pas au contraire, j'aime mon corps, j'aime ce que je vois. Ce que je vois est un état temporaire, les tubes qui dépassent ne m'appartiennent pas. Ce qui me répugne avec la fistule c'est que c'est une modification du corps plutôt qu'un implant. Cela me dégoute au même titre que quelqu'un pourrait être dégouté par des tatous, des fausses boules ou une face liftée; c'est carrément une mutation. Ce changement physique bouleverse mon identité. Je ne m'identifie pas comme quelqu'un de malade, mais lorsque je porterais la fistule, je n'aurais d'autre choix que de me dire, je suis malade et j'en porte la preuve visible. Tout cela peut vous sembler irrationnel, car avoir un tube qui sort du cou est loin d'être subtil. Pourtant, il m'est invisible et parce qu'il est un objet en plastique on l'identifie immédiatement comme temporaire.

Cette semaine on m'a enlevé Arnold, mon cathéter abdominal. Cela faisait environ deux mois qu'il ne me servait plus à rien puisque je suis maintenant en hémodialyse. Petite opération de routine en anesthésie locale. Comme je suis amant de la chance, il y a eu complication. Juste avant de partir, l'infirmière décide de jeter un dernier coup d’œil à mon pansement. L'horreur. Le pansement était imbibé de sang et une bosse comme si un Alien voulait me sortir du ventre habillait ma cicatrice maintenue par des broches en métal. Dommage que l'Halloween soit déjà passée. Hémorragie des tissus, probablement un vaisseau sanguin qui n'a pas été cautérisé comme les autres. Douleur constante et surtout, une sensibilité extraordinaire. Mon corps était tellement écœuré de se faire charcuter son réflex lorsque le médecin ou l'infirmière frôlait la région blessée, était une violente contraction accompagnée de chocs électriques violents dans mon cerveau.

J'ai passé une semaine tranquille mettons. Repos, dodo et anémie. Le médecin de la fistule m'a dit qu'en carrière il n'a eu qu'un seul cas d’hémorragie. Je ne vais courir aucun risque en lui suggérant de prendre les précautions nécessaires, car je risque fort bien d'être son deuxième cas! Cela commence à m'inquiéter pour la greffe. S'il y a une opération où je ne veux pas être un cas d'exception, c'est bien celle-là!

vendredi 16 septembre 2011

Message au monde médical

Le monde médical est probablement un des domaines humains les plus complexes et complets qui existe en ce moment. Ce domaine doit conjuguer à peu près toutes les sphères de connaissances pour pouvoir fonctionner adéquatement. Des dernières avancées technologiques qui regroupent à elles seules une multitude de domaines et en passant par les relations humaines, l'éthique et le développement organisationnel; la médecine est en constante évolution d'un bout à l'autre du spectre de l'évolution humaine.

Mon aventure récente m'indique toutefois qu'une certaine idéologie en place est dû pour un changement. Depuis mon admission à l'hôpital, les différents spécialistes m'ont toujours gardé informé de leurs observations et déductions concernant ma maladie et les traitements qu'ils jugeaient adéquats. Ils ont fait un travail de maître afin de vulgariser et m'informer de la situation, me permettant de comprendre et d'anticiper les étapes à suivre. Jusqu'ici, je ne peux rien leur reprocher. Là où j'ai un sérieux problème, c'est que depuis le début on me fait miroité qu'il existe plusieurs alternatives à mes traitements, que j'ai des options, que je peux décider de la façon dont je vais être traité. C'est faux. Depuis le début c'est de la calice de bullshit. Le seul choix véritable que j'ai eu c'est entre l'hémodialyse et la dialyse péritonéale. Qu'on me dise ensuite rendu en hémodialyse que j'ai différentes options de cathéter, que je vais avoir des décisions à prendre et que je devrais peser les pour et les contre de chaque méthode afin de faire mon choix est une remarquable tromperie. La vérité c'est que je n'ai pas le choix. Je devrais avoir une fistule au bras point final. D'ailleurs, j'en ai plein le cul qu'on me fasse croire que j'ai mon mot à dire dans toutes ces démarches.

Je comprends que la démarche est de faire sentir au patient qu'il est encore autonome ou je ne sais quel autre sentiment d'estime de soi. Tout cela est ridicule. Premièrement, je n'y connais rien et mes connaissances en la matière sont égales aux informations transmises par mes médecins. Ensuite, le spécialiste qui s'est tapé quinze ans d'études c'est le médecin et celui-ci devrait simplement m'informer de sa démarche point finale. « Monsieur, il se passe ci et ça et nous allons devoir faire ci et ça ». Pas de « il existe cette méthode et cette méthode et il serait aussi possible de faire cette méthode ». Par ce que quand ils vous disent ça, c'est qu'il y a en fait UNE méthode qui est supérieure et qu'en fin de compte c'est celle là qu'on va vous conseiller obliger à emprunter.

À chaque fois qu'on me donne un choix, je me fais de faux espoirs.

Message à la médecine moderne : Vous devez prendre les décisions, pas nous. Arrêter cette stupide mascarade au nom d'un service plus chaleureux. C'est de la crisse de marde.

jeudi 10 février 2011

Fin du premier chapitre.

C’est une espèce de gros beigne beige muni d’un lit étroit. L’infirmière me demande de m’allonger sur le ce lit et une commande électronique le soulève tranquillement jusqu'à la hauteur de l’ouverture de l’appareil impressionnant. Je sens à peine le picotement de l’aiguille qui s’enfonce dans ma peau. Je suis couché sur le dos, les bras allongés au dessus de ma tête lorsqu'elle connecte un tuyau au site d’injection. Je n’ai qu’à suivre les instructions dictées par la machine, me dit-elle. Le bruit de turbine électrique comme dans les films de science-fiction, une espèce de cillement qui prend de l’amplitude au fur et à mesure de l’accélération m’indique que la machine se met en marche; je peux voir des éléments tourner à l’intérieur, mais je ferme les yeux comme si cela allait me protéger. Le lit sur lequel je suis couché fait un premier mouvement d’aller-retour à l’intérieur de la machine. Une première voix se fait entendre: prenez une grande respiration et gardez là. Le lit fait à nouveau sa valse à l’intérieur de cette turbine. Je suis nerveux. Je me sens comme le condamné à mort. Je suis conscient de ce qui s’en viens, j’ai peur des conséquences et j’aurais aimé, je souhaite, que cela ait pu se passer autrement. Je tente de me calmer, de simplement lâcher prise. Je ne suis pas condamné à mort. L’infirmière prend le micro et de la pièce voisine, me parle: vous allez sentir l’injection et une chaleur dans tout le corps et c’est normal. La machine s'accélère; prenez une grande respiration et gardez là. J’entends le son du liquide qui est poussé dans mon bras comme lorsqu’on presse une bouteille et qu’il y a de petites bulles, mais je ne peux pas voir exactement ce qui se passe, puis une chaleur se repend dans tout mon corps, comme si j’avais uriné dans mon pantalon. Je trouve cela presque drôle, mais je sais qu’à cet instant c’est un poison qui circule dans mes veines, qu’une substance dont la présence n’est pas désirée envahit mon organisme. La sensation est un peu comme quand on se battre à l’école: on voudrait se sauver. Étrangement, mon premier réflexe est de me concentrer sur la sensation dans mon dos où se trouvent mes reins. Je me demande si mes organes souffrent en mourant. Oui je sais, c’est un peu étrange. Je crois ressentir quelque chose, comme une légère crampe, mais je ne sais pas si c’est une coïncidence ou si je prends tout cela bien trop au sérieux. C’est la première fois qu’on me fait du mal pour me faire du bien...

Ce matin les choses vont mieux. Je ne sens pas de différences avec la veille. Je ne suis ni épuisé et je ne ressens pas de douleur. Était-ce si grave que ça ? Mes reins ont-ils simplement encaissé le coup ? Ce qui est certain c’est qu’une nouvelle étape est franchie. Ce matin à la radio, Paul Arcand interviewait des membres de deux couples qui donnent un rein chacun au conjoint de l’autre. Une femme qui après huit ans de dialyse et d’attente sur la liste se rend compte qu’un collègue est compatible avec elle et que la femme de celui-ci est aussi en attente d’un rein et que l’échange avec son mari est possible. C’est une belle histoire, enfin... Huit ans... Merde.

mercredi 13 octobre 2010

Je n'ai pourtant pas peur des aiguilles !

Dimanche sont venus chez moi des amis pour m’encourager à m’injecter ma dose d’ANARESP. C’est un médicament que je dois m’injecter une fois par semaine et qui envoie un signal à mon corps de produire plus de globules rouges. Parce que je suis anémique, vous vous souvenez? Oui à cause de mes reins. Bon alors, ils sont venus chez moi pour m’encourager et c’est une bonne chose qu’il eut été là, sans quoi je ne suis pas certain que j’aurais réussis seul. C’est un combat. Ce n’est pourtant pas grand-chose, mais c’est une seringue que je dois m’enfoncer dans la cuisse, une pièce de métal qui doit traverser ma chair. Mon cerveau dit à mon bras « Dude… tu fais quoi avec ça dans les mains là » et lui de répondre « Je sais pas man, j’ai rien à voir là dans! »… « Ok dude, check tu vas laisser tomber ça pis tout va bien aller ok? ». Pendant ce temps moi je capote. Le geste n’est pas naturel… disons. Après de longues minutes de concentration et de dialogue avec chacun des membres du conseil d’administration de mon corps, j’ai finalement sèchement enfoncé l’aiguille tant redoutée dans la jambe. Merde, j’ai rien senti !

dimanche 1 août 2010

Résumé de ma saga médicale : 24 mai au 1er août

Alors, voilà. Mon histoire débute un lundi 24 mai à l'urgence du Montreal General Hospital, MGH pour les intimes et autres professionnels de la répartition rive-sudéens (dans les faits cela débute environ 2 mois plus tôt, mais comme c'est juste vraiment plate à raconter je m'abstiens). Je me pointe donc à l'urgence du MGH le 24 mai dernier. Pour ceux qui ne se souviennent pas, le 24 mai c'est férié, car c'est la fête des Patriotes. Job de marde oblige*, je travaille cette journée-là et je décide d'aller visiter les anglais, en soirée, afin de faire la paix... en fait, j'me trouvais juste bin drôle... en fait, c'est le beau-frère d'un ami qui m'a dit que les traumas de la STM étaient envoyés là et que le service était excellent. Je sais bien qu'il y a une sacré marge entre souffrir d'hypertension et manger un métro sur la gueule, mais je trouvais que ça faisait bin du sens de se pointer là.

*J'aime quand même ma job!

À mon arrivé au triage, c'était encore 1 à 1 en première période, 5e match Canadiens faisant face à l'élimination en finale de l'est contre (les tabarnak de) Flyers. L'anticipation pour ce match était aussi élevée que ma pression qui devait faire dans le 214/124 (pour les nouveaux, la normale maximale est 140/90). À peine ma carte d'hôpital créée, Canadiens tirait déjà de l'arrière 3-1 en deuxième... Belle soirée en perspective quoi.

Ils m'ont gardé pour la nuit. Canadiens éliminés, saison de hockey terminée, prises de sang, cathéter, électrocardiogrammes, test d'urine, pilules, lit d'hôpital, tensiomètre, le gros party quoi ! J'ai passé 4 jours dans le "short stay unit" du MGH où j'ai subi toute sorte de tests: radiographie des poumons, prise de sang, test d'urine, récolte d'urine (ça c'est vraiment dégueulasse, pisser dans le même pot pendant 24h, ça vous libère une odeur...), échographie du coeur, prise de sang, échographie au niveau de l'abdomen (non j'ai pas demandé quel sexe avait le bébé), prise de sang couché le matin, photo des reins en imagerie nucléaire, prise de sang... et prise de sang... sans oublier une scène pseudoérotique (dans ma tête) avec deux jolies étudiantes en médecine et peut-être un gars aussi... je ne sais plus. Bref, peu importe; je suis sorti le vendredi, armé d'une prescription afin de réguler ma pression, me disant naïvement que tout allait se terminer bientôt...

J'avance rapidement recopiant un courriel que j'ai envoyé à ma famille et mes amis le 20 juin dernier (parce que oui, c'est long avoir des résultats de tests!) :

Alors, voici les dernières nouvelles concernant mon enquête médicale... parce que c'est loin d'être terminé !

Plusieurs résultats de tests étaient enfin disponibles lors de ma dernière visite à l'hôpital avec ma néphrologue. On ne connait toujours pas la cause de mon bobo, mais certaines hypothèses peuvent maintenant être écartées. De plus, je crois bon de mentionner que je ne cours aucun risque tant que ma pression est maintenue par les médicaments. Ces chers médicaments d'ailleurs qui me donnent de joyeuses somnolences et m'empêche de produire adéquatement de la salive ! J'en ai encore pour plusieurs mois, car la propriété de ces médicaments est de ne pas agir (en bien ou en mal) sur les reins. Les médicaments habituels qui sont prescrits pour l'hypertension et qui n'ont pas d'effets secondaires font travailler un peu plus les reins ce qui est évidemment proscrit dans mon cas où mes reins fonctionnent inefficacement. Bon. En parlant de mes reins, je vais savoir plus tard cette semaine si leur condition s'est améliorée depuis 1 mois en analysant le niveau de protéines et de créatinine que ceux-ci laissent échapper dans mon urine (et/ou sang?)... je ne sais plus!

La première hypothèse à écarter est un problème cardiaque: mon coeur est super beau, plein d'amour et fonctionne à merveille.
La deuxième hypothèse à écarter est un dysfonctionnement des surrénales. Apparemment, celles-ci semblent bien fonctionner (je dis bien "semble" parce que c'est une enquête minutieuse où les facteurs s'entrecroisent et où les symptômes peuvent être la cause et vice et versa, donc rien n'est absolue)
La troisième hypothèse à écarter est un problème au niveau des artères rénales. Encore une fois, tout semble bien beau de ce côté, encore faudra-t-il que je passe un test de résonance magnétique pour complètement éliminer cette hypothèse (enfin, je crois que c'est pour ça que je dois faire ce test !)

Comme je n'ai ni blessure de guerre, ni blessure d'arme à feu, ni plaque de métal dans le crâne ou d'implant bionique, je vais pouvoir faire un tour de machine magnétique... et retourner dans le futur en 1985.
Une nouvelle piste à cependant été découverte ! Apparemment, mon hypophyse pourrait être en train de disjoncter, car un taux d'ACTH 2x plus élevé que la normale a été découvert dans mon système (soit 20 pmol/L au lieu de plus petit ou égal à 10 pour être exacte).
Cette nouvelle piste me donnera l'occasion de rencontrer une sommité mondialement reconnue dans le département d'endocrinologie. Mon rendez-vous n'est cependant pas encore confirmé.
Finalement, comme on ne peut pas encore écarter l'hypothèse d'une maladie du rein, je devrais aussi subir une biopsie des reins lorsque ceux-ci auront suffisamment travaillé sous une pression artérielle contrôlée... dans quelque mois donc.
Mon prochain rendez-vous est pour le 27 septembre en néphrologie. D'ici là, j'attends mon rendez-vous pour l'IRM et mon rendez-vous en endocrinologie ainsi que les résultats de mes prises de sang et tests d'urine de contrôle.

Je saute maintenant au 26 juillet avec un extrait d'un courriel envoyé à une amie:

Bon. Pour ce qui est de moi et de mon ressenti... Si j'avais écrit ce courriel hier je t'aurais dit: je vais très bien, je suis serein, ce qui m'arrive me motive et me donne l'énergie pour enfin me bouger l'cul... mais là ce matin, j'ai reçu un appel de ma néphrologue pour me dire que mon niveau de créatinine n'a pas baissé... en fait il est plus élevé qu'à mon arrivé à l'hôpital. Elle veut donc me rencontrer jeudi matin pour discuter. Ça donne un coup je dois t'avouer. Quand on entre à l'hôpital et qu'on est suivis par des spécialistes on s'attend à ce que des progrès soient constatés et que le processus de guérison suive tranquillement son court. Là ça me fait crissement chier. J'ai un peu la chienne aussi. Ton médecin t'appelle pour te dire qu'il veut "parler", c'est sûr que tu penses au pire... J'imagine que je suis mûr pour d'autres tests ou de nouvelles interventions. Enfin, je vais tenter de relaxer un peu et d'attendre jeudi avec patience.

Le jeudi est finalement venu. Dr. Gagnon avait plusieurs choses à me dire. Premièrement, elle est très satisfaite des efforts que je fais pour contrôler ma pression. En effet, et j'aurais l'occasion de vous en reparler, cette situation a provoqué quelque chose en moi; je suis hyper discipliné, et ce, sans grande difficulté. Donc, ma pression va très bien. Autre chose, les hormones vont bien; on oublis l'endocrinologue pour l'instant. Parfait. Jusqu'ici tout va bien, jusqu'ici tout va bien... j'appréhende l'atterrissage. "Tu fais un peu d'anémie, mais pas assez pour justifier une injection". Alors ça, ça peut expliquer bien des choses, comme mon manque continuel d'énergie ou ma capacité à m'endormir pendant une fête... quand elle n'est pas commencée...

Encore une fois, je saute les étapes, dont celle où mon docteur me dit qu'elle voudrait un échantillon de mon urine, car celle-ci est télescopique (en gros, ça veut dire que j'ai plein d'affaires dans mon urine qui ne devraient pas être là) et que pour l'enseignement ce serait vraiment enrichissant et qu'en plus elle travaille sur un livre et que finalement je vais peut-être être publié ! Ma pisse, pas moi... Je saute aussi l'étape où elle me dit que je suis loin de la dialyse (ouf! merci!).

Bon. Alors la grande nouvelle, c'est que mes reins ne fonctionnent qu'a 35-40% de leur capacité, qu'il n'y a pas eu d'amélioration depuis les deux derniers mois et que pour en savoir plus sur la nature du bobo, on doit passer à l'étape de la biopsie. Sur le coup, j'ai légèrement grincé des dents. Maintenant, avec quelques jours de recul, j'ai plutôt hâte que ça se passe et que de nouvelles données parviennent à mon doc. À partir de là, peut-être un traitement et assurément une nouvelle médication sans effets secondaires comme les horribles somnolences que j'ai en ce moment... je vous reviens sous peu... d'ici là, ne mangez pas trop salé !